A partir de l'" espace vide " et avec son groupe international, Peter Brook s'est lancé, depuis plus de trente ans, dans la quête des " formes simples ". Il a poussé le théâtre vers sa concentration extrême sans jamais sacrifier la présence de la matière ou le bonheur du jeu. Et cela afin de s'adresser toujours à la communauté tout entière. Il s'est appuyé sur le modèle shakespearien et a fréquenté le territoire africain. De Shakespeare, ce qui lui semble essentiel à capter, c'est la fluidité. Il l'érige en vertu essentielle de son travail qui s'accomplit à Paris dans ce théâtre unique que sont les Bouffes-du-Nord. Abattre les cloisons et ne jamais interrompre le mouvement, véritable règle de conduite, théâtrale et personnelle. L'Afrique, continent de la magie préservée et de la famine chronique, où Brook retrouve, réunis, le brut et le sacré, le visible et l'invisible, a fini par se constituer en véritable construction mentale. Elle acquiert chez lui les mêmes valeurs que les villages mythiques de Chagall ou Kantor, Vitebsk et Wielopole. C'est son Afrique. Témoin toujours présent, alternant le récit, l'aveu et la réflexion, Georges Banu retrace ici cette spécificité brookienne qui s'est dégagée à travers des spectacles mémorables tels Timon d'Athènes, La Conférence des oiseaux, Carmen, La Cerisaie, Le Mahabharata, La Tempête, L'Homme qui, Tierno Bohar..., stations de la voie conduisant vers un théâtre premier.